" Je n'ai jamais porté un autre parfum que celui qui a été créé pour moi à la demande de Guillaume pendant ce voyage à Paris. Il a remplacé le Bounce, il parle pour moi et me rappelle que j'existe. Une de mes colocataires a étudié pendant plusieurs années la théologie, l'archéologie, l'astronomie pour comprendre qui est notre créateur, qui nous sommes, pourquoi nous existons. Chaque soir, elle arrivait à l'appartement avec non pas des réponses mais des questions nouvelles. Moi, je n'ai jamais eu d'autres questions que celle du moment où je pourrais mourir. J'aurais dû choisir ce moment avant l'arrivée de mes enfants, car j'ai perdu depuis l'option de mourir. L'odeur surette de leurs cheveux cuits sous le soleil, l'odeur de la sueur dans leur dos la nuit au réveil d'un cauchemar, l'odeur poussiéreuse de leurs mains à la sortie des classes m'ont obligée et m'obligent à vivre, à être éblouie par l'ombre de leurs cils, à être émue par un flocon de neige, à être renversée par une larme sur leur joue. Mes enfants m'ont donné le pouvoir exclusif de souffler sur une plaie pour faire disparaître la douleur, de comprendre des mots non prononcés, de détenir la vérité universelle, d'être une fée. Une fée éprise de leurs odeurs."