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10 janvier 2011 1 10 /01 /janvier /2011 13:02

Livre+-+Wharton+-+libre+et+légèreLibre et légère, une nouvelle qui pourrait nous sembler "facile", et qui à mots couverts, sans jamais choquer son public, dénonce la société aristocrate du XIX°sc. En lisant son roman Eté, j'avais déjà retrouvé une écriture qui n'était pas sans me rappeler D.H. Lawrence, l'auteur, entre autre, de L'amant de Lady de Chatterley (partie 1, partie 2) , La fille perdue ou encore Femme amoureuse. 

 

Deux personnages principaux, dont les vies sont liées : Georgie et Guy. Ils sont cousins, s'aiment, sont fiancés. Elle est jeune, belle et frivole, calculatrice. Il est lui aussi jeune, beau garçon, et artiste. Sa profession joue contre lui, car son "innocente" cousine a bien du mal à se projeter dans un avenir de luxe avec un artiste, qui ne pourrait peut-être pas lui offrir la richesse qu'elle souhaitera. Aussi, quand Lord Breton lui demande sa main, elle n'hésite que peu à rompre ses fiancailles, après avoir provoqué une dispute avec Guy. Celui-ci, fou d'amour et du coup, brisé par le chagrin part à Rome avec son ami Jack Egerson.

 

Dès lors, Georgie va vivre une vie de Lady auprès d'un Lord vieillissant qui, évidemment n'est pas à la hauteur sentimentale d'une jeune femme. Il est malade, alors qu'elle se veut de tous les bals de Londres. Il est jaloux, vigilant, car elle est devenue la coqueluche du beau monde. Mais est-elle heureuse ? Non, car finalement, sortie du monde des apparences, elle s'ennuie auprès de son mari, refusant de subir l'autorité de ce dernier.

 

De l'autre côté, Guy se jette à corps perdu dans sa peinture. Il rencontre la jeune Teresina, dont le père veut la marier à un homme, alors qu'elle en préfère un autre. Guy, touché par la jeune personne, fait en sorte que le père de cette dernière fléchisse, et que la jeune fille soit heureuse.

 

Egerson rentre à Londres, Guy part dans les Alpes. Egerson rencontre alors la fameuse "Georgie", celle qui a brisé le coeur de son ami. Il tombe sous son charme, et pourtant, il n'hésite pas, lui, avec sa réputation de mysogine, à lui dire le fond de sa pensée. Georgie, en proie à un état dépressif, sa vie l'ennuie, et regrettant son choix amoureux, est plus que touchée par Egerson, qui ne fait que remuer le coup dans la plaie de la jeune Lady.

Parallèlement, Guy a rencontré la jeune Madeline Graham, fille d'un commerçant frutueux. Il s'attache à elle, chaque jour un peu plus. Non pas que l'amour ardent connu avec Georgie resurgisse auprès de Madeline. L'amour de Guy se construit au fil des rencontres, de ce qu'il découvre de cette jeune personne.

 

Chacun des deux personnages vit donc sa vie, après la rupture. L'une rongée par son choix, l'autre subissant un choix, mais rebondissant, parce que "plutôt la vie".

 

Il est intéressant de voir comment finit cette nouvelle, dans laquelle les mariages arrangés sont dénoncés, les mariages d'intérêts montrés dans toute leur hypocrisie. La liberté d'une femme de sa condition a été de choisir entre un homme qu'elle aime, et un homme qui lui apporterait richesse et renom.

 

 

Cette nouvelle est complètée par trois critiques du livre, par l'auteur elle-même, consciente de ce qu'elle vient d'écrire, ainsi que par une courte nouvelle nommée Expiation. Cette dernière raconte l'histoire du pseudo auteur de la nouvelle Libre et légère. Ce n'est pas un roman sulfureux,ce qui le rendrait sulfureux c'est tout ce que l'on en dirait, de ce qui se cache derrière l'attitude des personnages, de leur choix.

 

Edith Wharton, née en 1862, à New-York, fut la première femme à recevoir le Prix Pulitzer avec Le temps de l'innocence. Elle avait 14 ans lorsqu'elle écrivit Libre et légère, et qu'elle fit paraître sous un pseudonyme masculin "David Olivieri".

 


 

 

" C'est un triste aspect de la nature humaine que cette passion suicidaire d'écrire des romans qui atteint toute une catégorie de fanatiques inoffensifs, lesquels, sans avoir un grain de talent ni de formation littéraires, profitent de la liberté de la presse pour inonder le public exténué de balivernes sentimentales en volumes brochés."

C'est Edith Wharton elle-même qui dit ces mots, mots que l'on pourrait coller à nombre d'auteurs aujourd'hui, auteurs qui veulent nous faire croire qu'ils savent écrire, qu'ils inventent de nouvelles histoires, alors qu'ils ne font que reprendre des sujets, maintes et maintes fois abordés, souvent de manière "facile", ne surprenant plus le lecteur averti. Ils étouffent les rayons des libraires, cachant les vraies perles littéraires, faisant oublier, au public, ce qu'est la véritable littérature, à cause de cette tendance à la facilité.

 


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8 juin 2010 2 08 /06 /juin /2010 06:44

 

rogerdevillerouge

 

 

Le livre :

 

Roger et son cousin décident de ne pas assister aux vendanges du domaine de Villerouge, vers Narbonnes, et préfèrent aller voir la mer. Raymond de Villerouge, père de Roger les y autorise, en leur recommandant de faire attention. Roger laisse à Villerouge, Eleonore, sa cousine, dont il est amoureux. Les deux jeunes garçons, ivres de leur liberté, rencontrent une vieille femme qui leur jette un sort. Roger et Arnaud profitent de la plage, mais surviennent des corsaires barbaresques. Roger est enlevé, Arnaud tué. Le jeune homme va vivre d'incroyables aventures, avec une seule chose en tête, retrouver Eléonore.

 

 

Ce que j'en ai pensé :

 

Roman pour la jeunesse, Roger de Villerouge associe l'histoire du Moyen-Âge, ces aventures, ces tragédies et ces coutûmes. Roman d'apprentissage, où le jeune occitan découvre un monde méditerranéen dont il ignore tout. Confrontations à d'autres façons de vivre, d'autres saveurs, d'autres codes, Roger prend plaisir dans cette nouvelle vie, même s'il n'oublie pas Eléonore, la seule femme dans son coeur.

On retrouve, de manière simplifiée, la chevalerie et le romanesque de Chrétien de Troyes. Un petit roman à mettre dans les mains de tous les jeunes lecteurs.

 


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31 mai 2010 1 31 /05 /mai /2010 17:29

 

casemensonge

 

 

 

Le livre :

 

Martinique, quartier de Roucou. Djinala vit ici depuis sa naissance, avec sa mère, sa soeur aînée et son frère. Elle ne comprend pas que sa mère lui ait trouvé ce prénom qui semble rien vouloir dire. Elle a 13 ans, ne se trouve pas jolie, et écoute sa mère lui raconter qu'elles iront vivre dans un bel appartement, dans un autre quartier, loin du bidonville à quelques mètres de la plage, où seuls les touristes perdus attérissent là. Mais être sur la liste de ceux qui bénéficieront d'un appartement n'est pas gagné, Djinala le sait, et elle ne place pas tout son espoir dans ce départ.

 

 

 

Ce que j'en ai pensé :

 

C'est avec simplicité que Gisèle Pineau aborde la question des départements d'Outre-Mer, comme la Martinique. Elle y évoque l'extrême pauvreté d'une partie de la population, qui, souvent, se trouve manipulée par les politiques à la recherche de voix électorales.

Pour les habitants du quartier de Roucou, obtenir un appartement dans les nouveaux immeubles, c'est une priorité, l'assurance d'une vie meilleure, plus confortable, et surtout loin des aléas de la météo. Dans le bidonville, la société de consommation ne peut avoir court, alors que l'obtention d'un nouveau logement, salubre, est la porte ouverte sur ce mode de vie prisé par les touristes.


Chacun y va de sa combine pour obtenir que son nom soit sur la liste des premiers habitants sélectionnés pour un appartement. La corruption est là, l'amitié ne compte plus.

Djinala sait combien son quartier est un lieu d'errance humaine, que si le carnaval est le moyen de réunir une fois l'an les habitants pour souder leur fierté, cela ne dure que le temps des festivités. L'individualité est ce qui permet de se sortir de ce bidonville, au point d'en oublier les amitiés profondes, à remuer des affaires enterrées, à faire sortir des cadavres du placard.

 

A travers ce roman de littérature pour jeunesse, l'auteur traite non seulement de la difficulté de vivre dans un milieu hostile, mais aussi de l'amitié, et des coups de canifs que l'on met dans ce "contrat" par jalousie, par colère, sans souvent, se rendre compte de notre propre bêtise.

 

Djinala et sa mère obtiennent le logement, mais l'une comme l'autre savent que cela va attiser les envies, elles se taisent et se gardent bien de montrer leur joie de partir. Cependant, tout se sait dans ce genre de milieu clos. Les langues vont bon train et finissent par dénoncer des procédures illégales, sans toutefois avoir la preuve de ce qu'elles avancent.

 

Les langues se délient, crachent leur fiel, se sentent injustement méprisées par les pouvoirs en place, par les politiques dont la bouche est remplie de promesses qui sont autant de vent. Devant l'impuissance de leur situation, ces langues lâchent des secrets de famille, trahissent des amitiés.

 

 

Un joli roman sur la vie en communauté, avec ses travers, et ses joies aussi.

 

 


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15 mai 2010 6 15 /05 /mai /2010 06:35

 

le-chat-du-rabbin-tome-1

 

 

La bd :


Alger, dans les années 30. Léon Blum va bientôt accéder à la présidence de la France, l'Algérie est encore une colonie française. Juifs, arabes, pieds noirs cohabitent dans la capitale méditerranéenne.

Un rabbin de quartier, ayant une fille très belle, est affublé d'un chat. Ce dernier porte un regard sur la vie de son maître, de sa maîtresse. Un jour, par un étrange "miracle", le chat du rabbin acquiert la parole. Il interroge alors son maître sur la religion juive, les motivations à suivre ce qui est écrit dans la torah, et décide que lui aussi doit entrer en religion.

Pour le rabbin, c'est complètement incongru, un chat qui parle et qui veut faire sa Bar-Mitsva.



Ce que j'en ai pensé :


A ce jour, cinq tomes ont paru : La bar-Mitsva, Le Malka des lions, L'Exode, Le Paradis terrestre et Jérusalem d'Afrique.


Le chat est le regard sur le monde humain, il incarne la sagesse et la logique. Il montre les mensonges et l'hypocrisie qui animent les hommes.

 

Les femmes sont assez peu présentes, si ce n'est à travers la fille du rabbin. Elles sont réduites à un rôle quasi insignifiant, qui est à l'image du rôle que l'on consède à la femme. Elle doit être jolie, savoir tenir une maison, trouver un mari, se vouer à son foyer. Pourtant la jeune fille s'émancipe et ne manque pas de caractère. A travers ce personnage, l'auteur évoque les difficultés du mariage, la précipitation à "se ranger", qui peut, au fil du temps, se révéler un choix peu judicieux.

 

Chaque épisode du "chat du rabbin", évoque un thème différent, mais tous ont pour fil directeur la religion. Le chat s'emploie à montrer les contradictions qui animent les croyants / fidèles. Il montre un jeune étudiant du rabbin, dont le discours est très virulent. Il y prône une peur de Dieu, une vie entière vécue dans cette peur. Il se montre puritain, intransigeant. Et pourtant, un jour, le chat décide de le suivre, convaincu que ce jeune homme ne peut pas vivre selon les préceptes qu'il s'acharne à montrer à ses camarades. C'est ainsi que l'étudiant, vantant les mérites d'une non-sexualité avant le mariage, se rend dans les bordels réservés aux arabes. Hypocrisie de la croyance.

 

chatrabbin t1

 

Dans le tome 3 "L'Exode", alors que la fille du rabbin s'est marié avec un jeune rabbin moderne, Joann Sfar montre la différence entre le prêche des campagnes et celui de la ville. Déjà, le genre ne montre pas le respect qu'il doit à son aîné. Ensuite, sa manière de pratiquer s'est modernisée au contact de la vie occidentale. Le sabbat devient un arrangement avec la vie moderne. De plus, les parents du jeune rabbin ne sont pas des juifs pratiquants, ne vivent pas selon les préceptes juifs. Pas de repas kashers, pas de respect du sabbat. Le vieux rabbin, face à ce monde qu'il ne comprend pas se décide à enfreindre les lois de la torah. Il se rend dans un restaurant parisien, mange du porc, boit du vin, sans que rien ne soit kasher. Il constate que rien ne lui arrive. Doucement, il remet en cause les lois établies, mais pas sa religion.

 

La religion est une philosophie de vie. Certaines personnes préfèrent croire que de ne pas croire, parce qu'elles ont besoin de croire en quelque chose. Et puis, il y a la tradition, les coutûmes. Mais tout évolue, tout se perd aussi, tout se transforme dans une vie moderne où ce n'est pas l'homme qui s'adapte au manière de vivre, mais bien l'homme qui adapte sa religion à se manière de vivre.

Au fur et à mesure que l'humain évolue, la croyance en l'être suprême, l'utilité à suivre des lois de vie, devient moins évidente. La foi se caractérise-t-elle par rapport à suivre des lois dans les apparences, et à les transgresser dès que le regard de ses paires n'est plus là pour vous juger, ou bien à la vivre dans son coeur, sans hypocrisie, sans ce monde d'apparence ?

 

Le chat du rabbin offre un regard sur notre société, sur la religion (même si nous avons là un regard sur la religion juive), qui offre la part belle aux contradictions humaines, quant à leur foi.

 

 

choses-changent-johann-sfar-le-chat-du-rabbin-1-2002

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 06:28

 

lelivredemonpere

 

 

 

Le livre :


Yoichi se souvient de son enfance, dans le salon de coiffure de son père. Un coup de fil, et toute l'histoire familiale qu'il avait construit s'en trouve détruite. Son père vient de mourir. En se rendant dans son village natal pour assister aux funérails de son père, assistant à la veillée funèbre, il découvre combien sa perseption sur son père a été faussée par sa douleur d'enfant.



Ce que j'en ai pensé :


Depuis quelques temps, je découvre le monde de la bd. Certaines que j'ai acheté par coup de coeur comme celle-ci, et d'autres qui me sont conseillées par mon chéri.


Cette bande dessinée est en noir et blanc, sauf les deux premières planches qui sont en vert, et quelques vignettes, au début de l'histoire qui sont en couleur. J. Taniguchi a fait un travail de mémoire dans la vie d'un homme. D'un côté, il nous montre les souvenirs de cet enfant devenu adulte, vivant à Tokyo, de l'autre, il nous montre la vérité.

La vie ne contient pas une vérité. Chaque individu vit les situations auxquelles il est confronté, avec sa sensibilité, ses douleurs, ses croyances. Les non-dits sont source d'erreur.


Si Yoichi est victime du silence de ses parents, il devient bourreau de son père par son propre silence. Mais les raisons des non-dits, des silences sont de nature différente. Le père choisit de taire une situation à son enfant qu'il pense trop jeune pour comprendre. Le fils choisit le silence face à sa souffrance comme seul moyen de se protéger. Le père, sans doute conscient d'être responsable de l'attitude de son fils, se montre indulgent, compréhensif, et ne lui en veut pas. Pour Yoichi, il faudra le décès du père, et ce que la famille lui racontera de son histoire pour qu'il comprenne à quel point il s'est trompé sur son père, à quel point les choses auraient pu être différentes.

 

La parole reste le meilleur moyen d'expliquer les situations. Yoichi est abandonné par sa mère. Celle-ci ne trouvait plus auprès de son mari, l'écoute dont elle avait envie. Le déclencheur fut le grand incendie qui ravagea la ville. Les maisons, principalement en bois furent réduite à néant. La dette que contracta le père auprès de ses beaux-parents devait être payée. Ce dernier travaillait donc dur pour que sa famille vive bien, et que la dette fut réglée. L'honneur est très important chez certains individus, c'est un code chez les japonais. Là où il était question d'honneur, la mère mit cela sur le compte de l'orgueil. L'orgueil eut été que le père refuse le prêt de ses beaux-parents.

 

Yoichi a une soeur plus âgée, Haruko. Cette dernière était suffisamment grande pour comprendre ce qui se tramait au sein du foyer familial. Elle avait compris que sa mère se rapprochait de son professeur de musique, trouvant auprès de lui, ce qu'elle n'avait plus avec son mari. Alors, le divorce fut prononcé, la mère quitta le foyer, suivi le professeur et laisse les enfants à son ex-époux. Yoichi ne supportait pas le départ de sa mère, il s'enfermait dans le silence, fit tout pour fuir le foyer. Son père se remaria, et l'enfant devenu adolescent se renferma encore plus. Il cherchait un dérivatif à sa colère, au manque.

 

Yoichi a fait comme beaucoup d'enfant à qui l'on tait la vérité des faits, il se construit sa propre histoire.

 

Il se prend la vérité de son histoire lors de la veillée funèbre. Pourtant, chacun des membres présents lui montrent son plaisir de le revoir, personne ne lui fait de reproches, ne le juge. Le récit des souvenirs, de la vie du défunt aide Yoichi à découvrir les chainons manquants. Seul son oncle ose lui dire qu'il est passé à côté de son père, une pointe de rancune, sans doute, dû au gachis auquel il a assisté, impuissant. Pourtant, sa soeur, sa belle-mère ont la conscience qu'il y a, envers Yoichi des silences qui sont, eux, responsable de ce qui est arrivé, qu'on ne peut revenir sur le passé. La veillée sert à remettre les choses à leur place. Chacun doit être capable d'entendre la version des faits. Les deux femmes savent que si la vérité avait été expliquée à l'enfant qu'était Yoichi, celui-ci aurait sans doute pu vivre les choses autrement, vivre le traumatisme du départ de sa mère autrement.

 

9782203396098 1

 

Un très beau livre, très sensible, sur la difficulté des liens familiaux, et des dégats faits par les non-dits.

 

 


 

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7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 15:10

 

tsigane

 

Le livre :

 

Un enseignant se souvient des deux événements qui ont participé à sa décision de devenir professeur. Un moyen pour lui d'évoquer les tsiganes, la manière dont ils sont perçus, et surtout le fait qu'ils ne prennent pas la parole, chose qui arrangea beaucoup de personnes, notamment durant la deuxième guerre mondiale, où ces derniers furent eux aussi persécutés.

 

Ce que j'en ai pensé :

 

Le narrateur est un enseignant, qui, lors de débats, décident de faire partager son expérience à ses élèves. A la manière d'un conteur, il évoque deux souvenirs d'enfance, qui furent sa facination pour le monde tsigane, cette facination où la peur se mélange à la curiosité, cette facination qui attire.

Ce récit d'enfance subtil permet au professeur de parler d'une communauté méconnue, dont la réputation a été forgée au XVI siècle, et est solidemment ancrée dans l'esprit des gens. 

 

Nous connaissons les tsiganes sous différentes appelation, notamment 'rom', 'manouche', 'gitan', etc... Ils sont nommés en fonction de leur provenance géographique, mais il est noté que ce peuple nomade a en commun des origines indiennes.

 

C'est sous Louis XIV, que les tsiganes commencèrent à avoir la réputation qu'on leur connaît. Celui-ci supportait mal qu'ils fuent reçus dans les cours princières. Bannis des villes selon un décret royal, ils acquirent peu à peu une mauvaise réputation surtout liée à des phantasmes locaux.

 

N'oublions pas que l'étranger fait peur, nomade de surcroît, et qu'on préfère inventer plutôt que de chercher une vérité.

 

L'évolution de la société française, les lois obligent les tsiganes à se sédentariser peu à peu. Dès 1912, ils doivent posséder un carnet anthropométrique, fournissant des détails poussés permettant de les reconnaître, avec photos de face et profil, empruntes digitales, y compris pour les enfants.Ces carnets, qui n'ont rien d'une carte d'identité, non obligatoire, à l'époque pour le reste de la population, est un moyen de contrôle important.

 

carnetanthropométrique

 

Dès 1940, l'interdiction de circulation des nomades sur le territoire français est mise en vigueur. Les tsiganes pourraient être des espions potentiels, et surtout, cela permet d'accroître cette volonté de les sédentariser. L'Etat n'a de cesse de vouloir soumettre cette communauté à vivre comme le reste de la population française.

 

Au départ, le gouvernement de Vichy choisit de mettre à demeure les tsiganes. L'Etat fait bien la différence entre les nomades tsiganes et les personnes qui errent de villes en villes. Les premiers tsiganes internés le seront en Alsace-Loraine, dès l'automne 1940. Beaucoup de gens du voyages passeront par le camp de Rivesaltes. Si le gouvernement de Vichy accède aux demandes du III° reich concernant la population juive, il n'est pas solidaire des nazis concernant les tsiganes. Alors quand Allemagne, se déroule un véritable génocide tsigane (dont on taira longtemps l'existence), en France, il y a une réelle volonté de sédentariser cette communauté.

 

campsalier

 

C'est en 1942 qu'il sera décidé de la création du camps de Saliers en Camargue. Suffisamment loin de la population, mais pas trop quand même. La méconnaissance de cette population fait que les français leur prêtent des origines camarguaises à cause des rassemblements aux Saintes-Marie-de-la-mère. Il faut savoir que les acteurs à l'origine de ce camp sont liés à la Résistance, ce qui n'a rien d'anecdotique.

 

Le camp de Saliers doit s'intégrer dans l'esthétique camarguaise, et si ce sont des entrepreneurs qui commencent les travaux, très vite, le gouvernement fait venir des hommes du camp de Rivesaltes pour finir les constructions. Le camp imaginé au départ devient une utopie irréalisable. Pas d'eau potable, pas d'électricité, pas de chauffage, pas d'école ...

 

A la fin de l'année 1942, quand les premiers tsiganes arrivent dans ce camp, ils sont entassés dans des maisons, où très vite, l'insalubrité règne. Ne nous y trompons pas, cela ne vient pas des habitants, mais bien des structures qui sont sommères. Le manque de luminosité oblige à garder les portes ouvertes, laissant par la même occasion les bestioles entrer comme bon leur semble. Les toits de chaume, du fait de la mauvaise ventilation, de l'absence de chauffage, regorgent de vermine. De plus, la nourriture se fait rare.

 

Ce sont les enfants qui souffrent en premier de  la manière dont ils sont obligés de vivre. Malnutrition, maladie. Du coup, le gouvernement de Vichy décide, contre l'avis des parents de faire adopter les enfants, de les placer à l'assistance ou encore de les placer dans des établissements religieux. Cela ne fait qu'aller dans le sens de les voir se sédentariser, et donc de les "normaliser socialement".

 

La vie au camp est lamentable, l'école ne fonctionne pas, pas de bâtiment, pas d'enseignant. L'infirmerie n'est guère mieux lotie que les baraques, sans chauffage ...

 

Malgré la rudesse de la vie au camp de Saliers, peu de tsiganes y trouveront la mort.

 

Le camp de Saliers est un véritable échec. N'ayant pas été achevé, il n'a pu, dès le départ être voué à la réussite. Mais même si le camp avait été à l'image de ceux qui l'avait rêvé, aurait-on pu parler de réussite ? Peut-on considérer comme une réussite que de soumettre une population à la "normalité sociale" du pays dans lequel elle circule ?

 

Après un bombardement en août 1944, le camp a été déserté, sans doute encouragé par le chef du camp Albert Rosini.

 

Une exposition circule actuellement, elle vient de passer à Limoges : L'internement des Tsiganes pendant la Seconde Guerre Mondiale.

A voir, la video sur le site du Monde.fr : L'internement des Tziganes, une histoire française.

 

 

La France avait donc une volonté, celle de sédentarisé la communauté nomade, mais qu'en est-il aujourd'hui ? La situation ne change pas, il y a toujours cette même volonté, et l'évolution de la société oblige cette communauté à entrer dans une "normalité sociale".

 

 

L'Allemagne nazie, quant à elle, n'avait qu'un but, régénérer le sang allemand en le purifiant. Il faut savoir que la persécution des tsiganes ne commencent pas en Allemagne avec l'arrivée des nazies, elle prend juste de l'ampleur avec leur accession au pouvoir.

La violence destructrice des nazis à l'égard de la communauté nomade est une réalité. Il y a la stérilisation dès 1933, l'interdiction des mariages mixtes entre 1934-1935 et l'enfermement à Dachau dès 1936. Les nazis estiment avoir exterminé la moitié de la population tsigane d'Europe à eux seuls.

 

Quand on sait cela, l'existence des camps, on peut s'étonner qu'aucune mention n'a été faite du génocide tsigane, pourtant, on estime à au moins 500 000 le nombre de victimes tsiganes.

 

Cette communauté est bien différente de la nôtre, non pas en ce que nous "sédentaires", imaginons de leur vie, mais en ce qu'il en est dans la réalité. Les préjugés que nous avons à leur encontre, rassurez-vous, ils ont la même à notre égard.

 

Le génocide Tsigane se découvre peu à peu, car doucement, les enfants des camps se mettent à parler, pudiquement de leur histoire, pas de grands discours, juste des faits : insalubrité, vols du gouvernement de leurs affaires. Eux n'ont eu aucun indemnisation quant à leur histoire !

 

J'ai trouvé ses renseignements en visitant l'exposition à la BFM de Limoges le 24 avril 2010, j'ai complété en allant visiter le site Mémoire.net.

 


 


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3 mai 2010 1 03 /05 /mai /2010 07:49

 

Roman-Miss-Charity-Marie-Aude-Murail

 

  Le livre :


Miss Charity a cinq ans lorsqu'elle commence à nous raconter son histoire. Elle passe la plupart de son temps au troisième étage de la maison familiale. Anglaise, issue d'une famille d'aristocrate, Charity vit selon les codes de son monde. Ses parents, ayant eu deux fillettes décédées en bas âge ne semblent pas s'intéresser à elle. Tout juste se rappellent-ils qu'elle existe. Flanquée d'une gouvernante, Tabitha, elle reccueille des animaux, étudie les insectes, la nature. La nurserie devient alors une véritable ménagerie.

Le temps passant, il est décidé que la jeune fille fera son éducation auprès d'une demoiselle Blanche Legros, française, que Tabitha terrorise, la gouvernante s'enfermant au fil des ans dans une folie douce.

Miss Charity n'aime guère le monde, elle lui préfère de loin, le monde de la nature. D'ailleurs, c'est lors de vacances d'été, alors qu'elle est en visite chez sa marraine, que la jeune fille rencontre Kenneth Ashley, garçon qui finira par surgir, telle une étoile filante, à des moments surprenants, dans sa vie.

Miss Charity grandit ; sa mère, qui dans un premier temps se lamente de ne pas la voir rencontrer des jeunes gens, se trouve aise d'avoir sa fille à ses côtés. Mais la jeune fille n'est pas comme celles de sa société. Elle peint des aquarelles, au point d'en faire des livres ...




Ce que j'en ai pensé :


Au fil de ma lecture, j'ai pensé à Beatrix Potter. Sans doute le fait que Charity dessine des lapins, racontent les histoires des petits animaux qui l'entourent. Ce livre, qui a tout d'un pavé, se lit avec un réel plaisir. L'épaisseur pourrait rebuter, mais non, on se prend au jeu, de découvrir la vie de cette petite anglaise, de l'imaginer dans son monde.

J'ai aimé le ton dont l'humour lucide n'est jamais loin, et nous tire souvent un sourire au coin des lèvres.

 

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L'auteur nous dépeint, ici, une société anglaise, codifiée, que remet en question cette jeune aristocrate. Elle remet en cause le fait qu'une femme ne pourrait être éduquée, qu'une femme doit absolument avoir un mari pour exister, avoir des enfants. Elle relève avec horreur les remarques dont elle est l'objet concernant son célibat. Elle bouleverse les codes en travaillant, en devenant "auteur", en étant publiée. Personne dans sa famille n'a jamais gagné sa vie.

Ce livre est un véritable plaidoyer en faveur de la femme, l'auteur lui donne la part belle.


Les hommes n'y sont pas montrés sous leur meilleur jour. On les voit utiliser les femmes, les snober, les duper. Lorsque Charity vend son premier livre, elle est littéralement "voler", payer une misère alors que l'éditeur s'enrichit sur son dos, l'ouvrage faisant fureur auprès des enfants comme des parents. Il lui faudra du courage, de l'audace pour se faire payer à sa valeur, négocier son dû. Lorsqu'elle fait sa première tentative, pour vendre ses dessins auprès d'un directeur du jardin des plantes, elle se fait humilier, rabaisser. Les hommes n'ont que peu de considération pour la femme, celle-ci n'a qu'une utilité, dans la maison, à les servir, puis à servir la progéniture de ses derniers.

 

Ces thèmes ne sont pas rares dans la littérature anglaise fémine du XIX° siècle. Les auteures fémines tel Charlotte Brontë, Jane Eyre ou Jane Austen, Orgueil et préjugés, visent à dénoncer cette société machiste, dans laquelle la femme ne peut sortir de sa condition que si elle est belle, et richement dotée. Quel gachis ! Mais quand on y regarde de plus près, quand on nous annonce qu'en France, on tend à l'égalité homme-femme, notamment depuis 1945, avec le droit de vote, puis le droit à l'avortement, le droit à ne plus être sous la tutelle du mari, l'égalité des salaires, en tant que femme, nous savons bien que nous sommes loin d'une égalité avec le monde masculin.

On verra toujours la femme comme une futur mère, on la jugera toujours sur son physique, on s'attachera moins à son intelligence qu'à son apparence, on la verra toujours comme un ventre à bébé.

La femme potiche, il n'y a qu'à allumer son poste de télévision, à jeter un coup d'oeil sur les couvertures des magasines, pour comprendre que la femme égale de l'homme, ce n'est pas encore pour demain, quoi que l'on veuille nous faire croire !

 

Alors tant mieux, si certains livres, comme Miss Charity, vient rappeler à nos jeunes filles, qu'elles ont leur propre destin à accomplir, qu'elles ne sont ni futiles, ni inutiles dans notre société, bien au contraire, elles portent la moitié du ciel sur leurs épaules, leurs frêles épaules ...


Marie-Aude Murail, habituée à la littérature pour la jeunesse, nous offre là une belle histoire de femme. A mettre dans les mains de toutes les jeunes filles qui aiment lire.

 

 

 

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A lire, l'article des Lectures de Marie sur ce livre.

 

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27 avril 2010 2 27 /04 /avril /2010 13:17

 

serrurier 248

 

Le livre :

 

Marc menait la vie qu'il avait choisi. Pépère, en banlieue parisienne, une femme à qui il n'a toujours pas demandé de vivre avec lui, un boulot qui est risqué mais qui s'inscrit dans une certaine routine, convoyeur de fond. Toute sa vie va se trouver bouleverser le jour où, Marc sera victime d'un braquage. Ses deux collègues meurent, lui se trouve de longs mois à l'hôpital. Une nouvelle vie a réinventer, un traumatisme à supporter.

 

 

Ce que j'en ai pensé :

 

  Marc s'était toujours contenté de ce qu'il avait et n'aspirait à rien de mieux que ce qu'il était déjà : un homme ordinaire. Très tôt, il s'était avoué son goût pour la tranquilité et avait laissé aux autres leurs rêves de démesure. Jour après jour, il sculptait sa vie avec la patience de l'artisan qui sait que dans les objets les plus simples on trouve aussi de la belle ouvrage.

  D'ailleurs, d'où venait cette dictature des passions, des destins exceptionnels ? Qui avait décrété qu'il fallait choisir entre l'exaltation et la mort lente ? Qui s'était pris à ce point pour Dieu en affirmant que Dieu vomissait les tièdes ? Derrière chaque ambitieux, Marc voyait un donneur de leçons qu'il laissait libre de courir après ses grandes espérances. Lui ne demandait qu'à passer entre les gouttes, et à se préserver de la frénésie de ses contemporains. Si le monde courait à sa perte, il refusait d'en être le témoin.

 

Combien de Marc sur terre, qui n'ont qu'un désir, vivre leur vie et surtout que le reste du monde leur foute la paix ! Aussi, Marc, loin d'un monde d'apparence, loin de répondre à ce qu'une société peut attendre des gens qui la composent a choisi de vivre sa vie comme il l'entend, et de l'assumer. Il a une liaison qui vit au rythme des week-ends libres, imposés par le divorce de sa maîtresse, qui en passant, est son amour de jeunesse, il a son boulot, qui lui permet d'avoir une vie organisée, et routinière. Pas d'ambition, ne pas courir après un toujours plus qu'aujourd'hui on appelle la "croissance". Marc n'a pas besoin de reconnaissance sociale, il veut juste vivre tranquillement.

 

Seulement, la vie fait ce qu'elle veut. Le braquage de son camion blindé tourne au drame. Deux morts, et un traumatisme humain. Survivre, en sachant qu'on est le seul vivant de cette folie meurtrière, survivre des traumatismes physiques, survivre des traumatismes morals. Marc s'enferme sur lui-même, n'acceptant plus aucun contact avec l'humain que de manière obligé, cet humain, qui par sa soif du toujours plus, possible par l'argent, lui a volé sa vie "pépère".

 

A sa sortie de l'hôpital, Marc tombe peu à peu. Il perd tout ce qu'il a construit, il perd ses repères, il sombre dans l'alcoolisme, la violence. Enfin, et c'était une décision irrévocable, il voulait vivre à contresens du monde en marche. Se terrer quand les autres sont debout, et agir quand ils dorment. Il connut les plaintes des voisins, la tabagie du matin au soir, les crises de larmes sur les bancs publics, les journées entières dans l'alcool, les pulsions de violence envers lui-même et envers les autres. Un matin, en sortant d'un commissariat, il se retrouva devant la porte de son studio, sans clés, sans papier, sans argent. Une voisine eut la gentillesse d'appeler un SOS-dépannage-serrures qui arriva dans l'heure. En le voyant déballer ses outils et se mettre au travail, Marc lui posa des questions sur son job de serrurier.Mais il ne se perd pas lui. Car pour Marc, il s'agit avant tout de retrouver sa tranquilité, et de savoir comment la retrouver. Une rencontre suffira à provoquer un déclic en lui. Serrurier, il sera serrurier. Il s'oublie dans son travail, pour ne pas être seul face à lui-même dans son petit studio parisien. Il s'oublie dans un nombre incalculable d'heures, rencontrant ses contemporains, perdant leur clé pour diverses raisons.Rien ne le protégeait mieux que la nuit. Depuis l'hôpital, il en avait fait son territoir et s'y déplaçait désormais avec aisance. Pour Marc, l'espèce humaine se divisait en deux clans : ceux qui participent au monde en marche, et les autres. Mais à la tombée du jour, les règles changeaient : il y avait ceux qui dormaient, et ceux qui avaient une bonne raison de ne pas le faire. Parmi ceux-là, certains avaient un urgent besoin de lui et de son don pour passer les portes. Ces interventions nocturnes le reposaient de toutes les questions qui le terrorisaient à la lumière du jour. Cette vie à l'envers le remettait dans le bon sens, et rien ne lui semblait plus limpide que cette obscurité.

 

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Sa vie nocturne, harrassante s'achève par une séance à la piscine, qui lui permet de délier ses muscles endoloris par sa nuit, et toujours écorchés par le drame. La première séance avait failli mal se terminer. Il s'était senti infantilisé, à barboter dans le petit bain, sa bouée en briques de mousse bleu autour de la taille, à entendre la kiné qui disait "on" à chaque nouvel exercice : "Maintenant on va cambrer le dos et fléchir", "On vient de fournir un gros effort, on va se détendre un peu avant de reprendre" voilà qu'"on" cherchait à lui ôter son dernier bien : sa dignité de grand blessé.

 

Sa vie était redevenue routinière mais le drame et le traumatisme qui en avait découlé restait là, sûrement niché. Les séances épisodiques chez le psy ne l'aidaient qu'à certains moments, mais tout le travail restait à faire. Il rencontre alors une jeune femme brune, en plein divorce, les clés perdues  de son appartement chic et vide du XVI, ses déboires. Une autre rencontre lui permettra de fermer la porte de ce drame, pour se réinstaller dans la vie qu'il avait choisi.

 

 

Un roman humain sur le traumatisme, la descente aux enfers, et les moyens que chacun trouve en lui pour surmonter son drame humain et de nouveau, avancer.

 

 

 

Collection des carnets littéraires.

Dans la même collection

 

Portrait d'Ari la nuit ; L'Ours ; Cendres ; La chapelle sextine ; La photo ; Le sac à main

 

Livres tous offerts par Jean-Yves de Culture et débats

 

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23 avril 2010 5 23 /04 /avril /2010 10:10

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Le livre :

 

Ari est actrice, blonde aux cheveux courts, elle joue depuis un long moment les Monologues du vagin, d'Eva Ensler. Judas Levinn est écrivain et professeur à l'université de Leipzig. Leur route se croise, et se poursuit lors de conversations téléphoniques nocturnes pendant qu'Ari est en tournée. Petit à petit, Ari provoque Judas, pour voir ses réactions. Enfin arrivent les retrouvailles.

 

Ce que j'en ai pensé :

 

Je n'avais pas été enthousiasmée par les Monologues du vagin, même si j'en avais saisi la portée et l'importance. Juan d'Oultremont imagine ici ce que peut ressentir la lectrice publique de cette oeuvre. Beaucoup d'actrices ont joué les Monologues, mais qu'elles en sont les conséquences pour elles ?

J. d'Oultremont, à travers le personnage d'Ari, "fantasme" sur la portée auprès des femmes, d'entre prononcer le mot "vagin" comme on dirait "pain". Ari raconte à Judas que nombre de celles-ci ont la langue qui se délie, et voient en elle, une confidente, quelqu'un qui pourrait tout comprendre. En fait, l'auteur suggère que les révélations de ces femmes, proches ou anonymes, viendraient enrichir le livre d'Eva Ensler, confirmer ce qu'elle raconte. Mais l'actrice a-t-elle envie de devenir cette confidente de l'intime ?

Chez Ari, cela semble provoquer un goût du désir d'autres choses. Doucement, elle se livre à Judas, lui racontant ses amours déçues, qu'elle doit partager. A aucun moment, le lecteur, tout comme Judas ne s'interroge sur les préférences sexuelles d'Ari, d'ailleurs celle-ci sait jouer d'un discours ambigû.

Au fil de leurs conversations téléphoniques, de leurs relations, Ari se fait plus osée, elle se photographie nue, envoie ces dernières à Judas, sans le prévenir. Elle veut le surprendre, le provoquer sans doute, réveiller en lui des envies d'elle. Elle le teste, tout en se mettant en danger de séduction.

Ari est pleine de surprises, de ressources, d'ambiguité. Judas est un jouet, le jouet de son vagin, le jouet dont les Monologues aurait inventé le jeu.

 

Un roman surprenant.

 

Edité aux carnets Littéraires.

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19 avril 2010 1 19 /04 /avril /2010 13:29

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Le livre :

 

Mikael Blomkvist a retrouvé son siège au sein de Millénium, mais n'a plus de nouvelles de Lisbeth Salander depuis que celle-ci l'a quitté quelques mois auparavant. Cette dernière, dont la fortune est faite, coule des jours plus ou moins heureux en voyageant. Elle se décide enfin à rentrer en Suède, retrouve son amie lesbienne, Mimi, reprenant leur relation comme si le temps n'avait pas passé. Pourtant, Lisbeth reste sur ses gardes, bien qu'elle ait changé. L'argent lui a permis de modifier sa poitrine, de faire effacer des tatouages qui n'avaient plus raison d'être. Elle garde toujours un oeil sur son tuteur qui l'avait violée de manière vicieuse et sadique, ne se doutant pas qu'il ne désire que sa mort.

 

 Lisbeth refuse tout contact avec Blomkvist. Cependant, indirectement, leur chemin va se croiser de nouveau. Lisbeth reprend contact avec son ancien patron, non pas pour un travail, elle est désormais à l'abri du besoin, mais par habitude sans doute, par affection probablement. Elle découvre aussi que son précédent tuteur, contrairement à ce qu'elle pensait, n'a pas succombé à une attaque. Elle lui rend visite, retisse des liens.

 

Du côté de Millénium, un nouveau journaliste fait son apparition. Alors que la femme de ce dernier fait son mémoire sur la violence et l'exploitation des femmes, lui écrit un bouquin sur le sujet, n'hésitant pas à dénoncer ouvertement et en citant des noms, les personnes ayant recours au sexe payant d'un côté, et qui de l'autre, se prétendent les gardiens de l'ordre moral. Il met en avant l'hypocrisie de certaines catégories de hauts fonctionnaires, répressifs d'un côté et consommateurs de l'autre. Malheureusement, en fouillant trop, en posant trop de questions, il finit par s'attirer les foudres d'un nommé Zala, qui finit par les faire assassiner, lui et son épouse. Un troisième meurtre survient, celui du tuteur de Salander. Il n'en faut pas moins pour que cette dernière devienne l'ennemi public numéro 1.

 

 

Ce que j'en ai pensé :

 

J'avais été particulièrement déçue par le premier tome Les hommes qui n'aimaient pas les femmes, que je trouvais trop dispercé, trop de thèmes, pas assez fouillé, et avec des rajouts d'éditeur qui m'avaient dérangée. Tétue, et possédant les deux autres tomes, j'avais laissé passer le temps, et finalement, je me plongeais dans ce deuxième volume.

 

Il faut le dire, j'ai plus apprécié ce second opus de la trilogie. Beaucoup mieux ficelé, et surtout plus cohérent, je l'ai lu plus rapidement et avec plus de plaisir. Et puis nous sommes aussi sortis de la "Millénium mania", un fanatisme en chassant un autre, il est toujours plus facile de se montrer lucide et critique sur une oeuvre dont on ne nous rabache pas / plus les oreilles. Je retrouvais donc nos deux héros, ou anti-héros, détonnants avec ce que nous avons désormais l'habitude de voir. Et oui, ils ne sont pas forcément beaux, pas riches, pas people, ils sont atypiques, et surtout terriblement humains.

 

J'ai aimé le travail de Salander sur elle-même, la conscience qu'elle prend de sa place dans la société, de ce qu'elle veut, ne veut pas, mais aussi la conscience des répercutions de son comportement sur son entourage, qu'on ne peut pas toujours fuir, qu'à un moment il faut affronter. Il y a aussi la conscience qu'il faut aussi laisser le choix à ceux qui nous entourent de vouloir ou non notre présence et de ne pas décider tout seul. La Lisbeth Salander de ce nouvel opus n'est plus la Lisbeth Salander des Hommes qui ... Elle grandit, murit, devient plus adulte, plus femme aussi sans aucun doute.

Les monstrueuses accusations dont elle fait l'objet dans ce deuxième tome, les remises en question qu'elle doit affronter sur elle-même, la recherche sur son propre passé, l'oblige aussi à se tourner vers l'avenir tout en continuant à s'interroger sur elle-même, sur qui elle est. Après tout, on n'a rien sans rien.

 

J'ai aimé aussi la manière dont Stieg Larsson a démonté la machine médiatique, le fait que celle-ci a toujours besoin de chair fraiche, de sensationnel. Lisbeth, accusée d'un triple meurtre, devient l'objet de toutes les attentions, les plus malveillantes bien entendues. Le coupable doit avoir une tête de coupable, des moeurs de coupable. Larsson explique comment les médias créent un coupable idéal, pour un public assoiffé de ce genre d'histoires monstrueuses. L'auteur montre aussi le travail de la police qui d'un côté pourrait se contenter de ce coupable idéal pour l'opinion public, pour les médias, et de l'autre, doit se battre pour se défaire de cette communication de masse basée sur des rumeurs, sur des indices péchés deci delà, et se recentrer sur des priorités qui ne sont pas moins que la recherche de la vérité, la seule, la vraie et non celle qui arrangerait le public, par rapport à ce que les médias créé. Il y a bien là une réelle dénonciation de la manipulation médiatique qui fait que le public et pas seulement lui ne sait plus où est la vérité.

 

Le troisième point est de dénoncer le traffic humain des femmes dans les pays de l'est, en Suède. D'un côté une société puritaine qui s'insurge contre le sexe payant, et de l'autre, cette même société qui en consomme. La violence fait aux femmes était déjà abordée dans le premier tome, au sein de la famille, par des histoires d'inceste. Au delà du sexe, il y a aussi la viciosité, le sadisme et la place de la femme dans la société. Traitée comme un animal, même pire qu'un animal, elle n'a aucune valeur. Larsson montre le traffic des femmes de l'est, qu'on oblige à se prostituer, qu'on fait plier à coup de drogue, de correction, par une politique de la terreur.

 

 

Bref, j'ai trouvé ce deuxième tome beaucoup plus intéressant à tout point de vue que le premier. Il me reste le troisième volet à lire. En attendant, j'ai d'autres lectures en réserve.

 

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